Rapport annuel
Les annexes du rapport
Summary
CSA - Conseil supérieur de l'audiovisuel
Rapport annuel 2010

Avant-propos

Les chiffres clés du CSA en 2010

Les chiffres clés de l'audiovisuel

Les dates clés du CSA en 2010

Synthèse

2010, le CSA au cœur des mutations technologiques, économiques, culturelles et sociales du numérique :
bilan et perspectives

Le Conseil

L’activité du Conseil en 2010

I - La gestion des fréquences et des services

II - Les autorisations, conventions et déclarations

III - Le suivi des programmes

IV - Les mises en demeure, les sanctions et les saisines de l’autorité judiciaire

V - L'activité contentieuse

VI - Les avis

VII - Les nominations

VIII - Les études et la prospective ; la communication

IX - Les relations internationales

Les membres du Conseil et leurs domaines d'activité

Les communiqués

Les délibérations

Rapport annuel 2010

Synthèse

 

L’action du Conseil supérieur de l’audiovisuel en 2010 s’est inscrite au coeur des mutations économiques, culturelles et sociales entraînées par la généralisation des technologies numériques, telles qu’elles sont ressenties aussi bien par les professionnels que par le public.

Le paysage audiovisuel est passé de manière irréversible dans l’univers numérique avec l’arrêt de la diffusion analogique terrestre dans dix régions : Alsace, Basse-Normandie, Pays de la Loire, Bretagne, Lorraine, Champagne-Ardenne, Poitou- Charentes, Centre, Bourgogne et Franche-Comté. Le passage de Canal+ au tout numérique est achevé depuis le 24 novembre 2010. Ces opérations complexes se sont très bien déroulées, grâce au travail de tous les partenaires, principalement les pouvoirs publics, le groupement d’intérêt public France Télé numérique et, bien sûr, les chaînes qui contribuent au financement du processus. De plus, en raison des vastes campagnes d’information qui ont été réalisées et de la mise en place de dispositifs d’aide ciblés, toute fracture numérique a pu être évitée.

La poursuite de l’extension de la couverture de la télévision numérique terrestre (TNT) participe de cet objectif. En 2010, le travail des services du Conseil a permis la numérisation de 440 émetteurs supplémentaires sur les 1 626 du plan cible. À la fin de cette année, près de 94 % des foyers français peuvent recevoir la TNT par l’antenne installée sur le toit de la maison ; 86 % des foyers reçoivent la télévision numérique sur au moins un de leurs postes ; 56 % des foyers reçoivent la télévision numérique par voie hertzienne terrestre ; l’équipement des postes secondaires progresse très rapidement.

Le Conseil veille à ce que tous nos territoires et tous nos concitoyens bénéficient des avantages de la révolution numérique. Le 30 novembre 2010, le premier multiplex de TNT a été mis en service outre-mer : 95 % de la population ultramarine peut avoir accès, avec la norme MPEG-4, à la chaîne Pays 1ère propre à chaque territoire, ainsi qu’à France 2, France 3, France 4, France 5, France Ô, France 24, Arte, et jusqu’à deux chaînes locales par territoire.

L’extension du paysage audiovisuel numérique s’est aussi poursuivie en métropole, avec la diffusion nationale de France Ô depuis le 14 juillet 2010, et le lancement de nouvelles chaînes locales, désormais au nombre de 50. Le Conseil a également sélectionné, le 16 décembre 2010, une nouvelle chaîne de TNT payante, CFoot. La décision de relancer la TNT payante a été prise par le Conseil à la suite des Rencontres de la télévision payante organisées le 29 mars 2010, et en tenant compte des résultats de la consultation lancée le 26 juin 2009 sur l’usage de la ressource libérée par l’extinction de la diffusion analogique et de l’arrêt des chaînes payantes AB1 et Canal J. Le Conseil a également décidé, le 16 novembre 2010, de lancer un appel à candidatures pour l’édition d’un ou plusieurs services de médias audiovisuels à la demande sur la TNT.

Pour développer pleinement les innovations issues du passage au tout numérique, le Conseil doit tenir compte tant des attentes du public que des besoins des professionnels : cet équilibre conditionnera le lancement éventuel de la télévision mobile personnelle (TMP) et de la radio numérique terrestre (RNT). Le rôle du Conseil est de diffuser l’innovation technologique auprès du plus grand nombre pour satisfaire tous les publics, développer la création, mais aussi pour garantir les ressources des entreprises et leur capacité d’investissement dans les contenus comme dans les réseaux.

C’est dans le même esprit que le Conseil a engagé une réflexion sur la place des innovations technologiques au sein du spectre hertzien, qu’il s’agisse des services à la demande, ou de la télévision en relief ou dite en « trois dimensions », très consommatrice de fréquences, et sur la place d’autres modes de diffusion de l’innovation. La plateforme hertzienne a vu son attractivité renouvelée grâce à l’arrivée de la TNT. Elle demeure aujourd’hui la seule gratuite et surtout le seul mode de réception pour 60 % des Français.

Le Conseil a d’ailleurs amorcé un travail plus large sur l’avenir du spectre hertzien. Au cours des dernières années, il a considérablement renforcé la disponibilité des fréquences. Ainsi, le plan FM+ a conduit à une hausse de 20 % de la densité d’occupation de la bande FM. De plus, le passage au tout numérique a permis de libérer la bande 790-862 MHz au profit des CSA 2010_interne_version Pantone_CSA 2010 19/05/11 19:57 Page25 opérateurs mobiles. Cependant, l’optimisation du spectre nécessite de garantir un bon niveau de protection de la réception. Le Conseil a donc planifié les multiplex nécessaires à l’élargissement du paysage audiovisuel prévu par la loi, ainsi que ceux qui serviront à l’extension de la haute définition. Le passage de toutes les chaînes de la TNT à la haute définition, qui occuperont huit multiplexes, prendra sans doute quelques années. Il s’agit de laisser aux Français le temps de s’équiper et aux chaînes de prendre en charge le coût supplémentaire qui en résulte. Comme le Conseil a souvent eu l’occasion de le souligner, l’optimisation du spectre ne peut se faire ni au détriment de la desserte de la population, ni à celui du public. Enfin, l’optimisation ayant été financée par les professionnels de l’audiovisuel, ceux-ci doivent pouvoir y développer leurs innovations.

En effet, les nouveaux services diffusés sur l’internet ne cessent de progresser, entraînant des bouleversements aussi bien pour les professionnels que pour le régulateur. Ainsi, le Conseil prend désormais en compte dans sa régulation les services de médias audiovisuels à la demande (SMAD) comme la télévision de rattrapage ou la vidéo à la demande. Il a adopté le 14 décembre 2010 une délibération relative à la protection du jeune public, à la déontologie et à l’accessibilité des programmes sur les services de médias audiovisuels à la demande. Celle-ci prévoit que le système de la classification des programmes et la signalétique sont identiques à ceux qui sont applicables sur les services de télévision (tous publics, -10, -12, -16, -18). Les contraintes horaires de diffusion se limitent aux programmes « déconseillés aux moins de 16 ans » mis à disposition gratuitement et aux programmes « déconseillés aux moins de 18 ans » accessibles par abonnement. La délibération recommande la mise en oeuvre de deux espaces clairement identifiés dans les SMAD : d’une part, un espace réservé uniquement aux programmes déconseillés ou interdits aux mineurs de 18 ans et à leurs bandes-annonces, verrouillé par un code spécifique ; d’autre part, un « espace de confiance » contenant uniquement des programmes « tous publics » destiné aux familles et au jeune public. La délibération rappelle également que les principes généraux de la déontologie s’appliquent aux nouveaux services à la demande. Pour la première fois en 2010, le Conseil a d’ailleurs été conduit à agir à l’encontre de l'ensemble des éditeurs proposant des déclinaisons d’un même programme (émission Dilemme) contrevenant au respect de la dignité de la personne humaine ainsi qu’aux dispositions relatives à la protection du jeune public : une chaîne de télévision hertzienne, une chaîne spécifique diffusée sur internet et une plateforme permettant d’accéder en ligne à des vidéos.

Depuis quelques années, l’internet joue un rôle important dans le domaine de l’information. Le Conseil est conscient des difficultés auxquelles les chaînes sont confrontées, notamment quant à la vérification de l’authenticité des sources et des contenus. Pour autant, les principes de la déontologie de l’information ne sauraient être remis en cause. L’audiovisuel doit jouer un rôle de référence face à la multiplication des sources d’information. C’est pourquoi le Conseil a engagé cette année, avec les chaînes, une réflexion commune sur la déontologie de l’information face à l’internet.

Un autre grand chantier du Conseil concerne l’accessibilité des programmes aux personnes souffrant d’un handicap auditif ou visuel. C’est un sujet sur lequel les chaînes ont progressé de manière décisive en 2010. En effet, l’impératif fixé par la loi du 11 février 2005 d’une accessibilité totale des programmes des grandes chaînes hertziennes aux personnes sourdes ou malentendantes a été respecté : les chaînes dépassant 2,5 % de l’audience totale de la télévision remplissent leurs obligations depuis le 12 février 2010. L’année 2010 a également été marquée par la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2009 qui dispose que les services de télévision privés diffusés en mode numérique dont l’audience moyenne annuelle est supérieure à 2,5 % de l’audience totale des services de télévision doivent diffuser des programmes en audiodescription. C’est le fruit de l’engagement constant du Conseil en faveur de l’accessibilité de la télévision aux personnes aveugles ou malvoyantes.

L’attention portée à la cohésion de notre société a également conduit le Conseil à renforcer ses exigences pour la représentation de la diversité dans les médias audiovisuels. Sur le fondement de la délibération du 10 novembre 2009 et des avenants aux conventions des éditeurs privés, le Conseil a validé en février 2010 les engagements proposés par les chaînes gratuites de la TNT et Canal+ qui valent obligations conventionnelles pour l’exercice 2010. Tous les diffuseurs ont ainsi décidé d’introduire une clause de diversité dans les contrats de commande de programmes, de réaliser des opérations de sensibilisation de leurs équipes à la question de la diversité et d’obtenir des résultats en amélioration à l’antenne s’agissant principalement des programmes en lien avec la réalité de la société française. Plusieurs chaînes ont même souscrit une clause de nonrecul portant sur un certain nombre de critères d’évaluation de la diversité sur leurs antennes. Les résultats des deuxième et troisième vagues du baromètre de la diversité, respectivement réalisées en février et septembre 2010, montrent les premiers signes d’une amélioration de la représentation de la diversité sur certaines chaînes et dans certains genres de programmes par rapport à l’année 2009.

L’évolution de la demande sociale vise également les contenus et leur qualité. Il ne s’agit pas, bien évidemment, de porter atteinte à la liberté éditoriale des chaînes, mais plutôt d’approfondir le dialogue avec elles et d’encourager les bonnes pratiques. Cette exigence de qualité ne doit pas être ressentie comme un coût supplémentaire ou une contrainte, mais comme un gage d’attractivité et une opportunité dans la compétition internationale.

Le Conseil a ainsi porté une attention particulière à la place de la fiction. Il a publié le 28 juin une étude qui montre que la fiction américaine a été la grande gagnante de l’accroissement du nombre d’heures de fictions diffusées depuis le lancement de la télévision numérique terrestre. Cette évolution se retrouve au niveau des audiences : si, en 2005, la fiction française de 90 minutes réalisait 56 des 100 meilleures audiences, contre 4 pour la fiction américaine de 52 minutes, aujourd’hui le rapport s’est nettement inversé. En 2009, la fiction française n’a réalisé que 4 des 100 meilleures audiences, et la fiction américaine 63. De surcroît, une étude publiée par le Conseil le 9 décembre révèle que cette situation est une exception en Europe : en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie ou en Espagne, la fiction nationale arrive en tête des audiences devant la fiction américaine. Les principaux facteurs d’amélioration sont à rechercher dans le financement et l’organisation de la filière. Le Conseil a toujours été particulièrement attentif aux conditions de financement du secteur de l’audiovisuel et de la création, notamment dans le cadre des discussions sur les décrets « production ». Il a eu l’occasion de rappeler la nécessité de préserver la part de financement dévolue à la création française inédite. Cela étant, lorsque l’on compare la structure de coût d’une fiction américaine à celle d’une fiction française, on constate que la principale différence tient à l’investissement en amont, notamment dans l’écriture, qui est bien plus important aux États-Unis. Il s’agit d’une condition essentielle si l’on veut poser les bases d’une fiction française originale et dynamique.

Le Conseil reste particulièrement attentif au financement de l’audiovisuel privé. Même si la chute des recettes publicitaires semble enrayée, la hausse de celles-ci de 15 % en 2010 a profité surtout aux nouveaux entrants de la TNT. Il est donc nécessaire de poursuivre une action qui garantisse la bonne santé économique du secteur, comme l’a fait le législateur en 2010 avec l’ouverture de nouveaux marchés publicitaires. Ainsi, le Conseil a adopté, le 16 février, une délibération fixant les conditions dans lesquelles les programmes des services de télévision peuvent comporter du placement de produit. L’année 2010 a été marquée par une autre innovation : l’ouverture à la concurrence et la régulation de certains secteurs du marché des jeux d’argent et de hasard en ligne prévue par la loi du 12 mai 2010. Dans une délibération du 18 mai, le Conseil a fixé les conditions de diffusion des communications commerciales en faveur des opérateurs de jeux d’argent et de hasard légalement autorisés. Il interdit les communications commerciales en faveur des opérateurs de jeux sur les services de télévision et de radio présentés comme s'adressant aux mineurs et, sur les autres services de télévision et de radio, dans les programmes présentés comme s’adressant aux mineurs, et durant les trente minutes précédant et suivant la diffusion de ces programmes. Cette délibération permet de respecter l’intention du législateur, qui était d’ouvrir ce nouveau marché publicitaire, tout en fixant des conditions très restrictives au regard de la protection du jeune public.

Le Conseil veille également au financement de l’audiovisuel public, notamment parce que France Télévisions est le premier soutien à la création audiovisuelle dans notre pays, avec 52,1 % du total des investissements dans la production inédite, toutes chaînes numériques confondues. France Télévisions doit disposer des moyens nécessaires pour soutenir l’innovation et la créativité, tout en assurant sa transformation en média global et en s’adaptant aux nouveaux modes de diffusion : développement du multisupport, mise en place de services non linéaires, mobilité, passage au tout-HD.

Il s’agit enfin pour le Conseil d’anticiper. L’apparition des téléviseurs connectés et de l’interactivité en matière de publicité aura un impact sur la chaîne traditionnelle qui lie l’annonceur, les agences et les régies publicitaires des chaînes ou des services à la demande. C’est pourquoi il est légitime que les nouveaux acteurs de l’audiovisuel participent au financement de la création. Toute entreprise qui bénéficie économiquement de la diffusion d’oeuvres de création doit contribuer à ce financement. C’est déjà le cas pour les fournisseurs d’accès à internet. Il s’agit d’étendre cette obligation à l’ensemble des acteurs de façon intelligente et graduée afin de construire une relation partenariale de long terme. C’est dans cet esprit que le Conseil a rendu un avis défavorable, le 27 septembre 2010, au projet de décret sur les SMAD qui ne correspondait pas, selon lui, à la réalité économique du secteur. Cet avis était notamment motivé par le risque, réel, de délocalisation : d’ores et déjà, un service établi au Luxembourg propose ses films à un tarif moins élevé de 20 % et a acquis des parts de marché importantes sans contribuer au financement de la fiction française ou européenne. Le Gouvernement a pris en compte les remarques et préconisations formulées par le Conseil ; il a donc modifié le projet de décret, permettant ainsi de créer les conditions favorables à un développement des plateformes françaises afin que celles-ci puissent financer la création sur le long terme.

C’est ce nouvel univers concurrentiel que le Conseil est conduit à réguler. En donnant son accord, assorti d’engagements substantiels, à l’achat des chaînes TMC et NT1 par le groupe TF1 le 23 mars 2010, il a ainsi considéré qu’un tel rapprochement devait être apprécié au regard d’un contexte économique marqué par de profonds bouleversements : disparition progressive des frontières entre « gratuit » et « payant », développement de la concurrence de l’internet, apparition de nouveaux acteurs de dimension mondiale comme Google…

La régulation audiovisuelle doit désormais s’inscrire dans un environnement numérique multisupport et tenir compte de la généralisation progressive des téléviseurs connectés. Le Conseil veillera à ce que les chaînes de télévision puissent profiter des complémentarités offertes par le développement de l’internet. Il souhaite par ailleurs qu'elles ne subissent pas, de la part des autres acteurs de celui-ci, une concurrence déloyale qui résulterait d'une réglementation trop déséquilibrée, notamment en ce qui concerne la contribution au financement de la création. L’objectif du Conseil est de favoriser une révolution technologique répondant aux aspirations profondes du public et offrant de nouvelles potentialités aux professionnels, tout en veillant à l’équilibre économique du secteur audiovisuel.

 

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