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Texte juridique

Avis du 12 mars 2003 sur le projet de décret relatif à la retransmission télévisée des événements d'importance majeure

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Le 12 mars 2003 a été adopté par le Conseil un avis sur le projet de décret relatif à la retransmission télévisée des événements sportifs d'importance majeure. Cet avis a été transmis au ministre de la Culture et de la Communication.
 
" Monsieur le Ministre,
 
Vous avez bien voulu transmettre le 21 janvier 2003 au Conseil supérieur de l'audiovisuel un projet de décret d'application de l'article 20-2 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, visant à encadrer la retransmission télévisée des événements dits "d'importance majeure" pour la société, afin de recueillir ses observations.
Le législateur n'ayant pas prévu la saisine pour avis du CSA sur ce texte, le Conseil vous sait gré d'avoir eu le souci de le consulter.
 
Avant de se prononcer, le Conseil a souhaité entendre les éditeurs de services de télévision susceptibles de se porter acquéreur des droits de retransmission de ces événements, à savoir TF1, France Télévision, M6, Canal+, Eurosport, Sport+ et Paris Première.
 
Les observations formulées par ces opérateurs, à l'occasion d'une réunion qui s'est tenue le 27 février dernier, ont essentiellement porté sur le contenu de la liste des événements retenus, au nombre de 21, dressée à l'article 3 du projet de décret. Elle ont mis en exergue un clivage, prévisible, entre éditeurs de services à accès libre, favorables à une liste nourrie, et éditeurs de services à accès restreint, partisans d'une liste condensée.
 
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, pour sa part, avait indiqué le 2 mai 2000 au ministre de la Jeunesse et des Sports et au directeur de la Direction du développement des médias qu'une liste comportant un trop grand nombre d'événements était sans doute facteur de banalisation des compétitions véritablement "majeures", qualifiées d'"extraordinaires" par le législateur communautaire au considérant 21 de la directive Télévision sans frontières, et source de fragilité juridique.
 
Il semble en effet peu satisfaisant de dresser une liste s'écartant des lignes directrices établies par la Commission européenne, aux termes desquelles au moins deux des quatre critères qu'elle a retenus doivent être réunis pour emporter la qualification d'"événement d'importance majeure" :

- l'événement fédère un public plus large que celui traditionnellement concerné ;
- l'événement participe de l'identité culturelle nationale ;
- l'événement implique l'équipe nationale dans le cadre d'une manifestation d'envergure ;
- l'événement fait traditionnellement l'objet d'une large audience télévisée.
 
En charge de s'assurer, conformément au deuxième paragraphe de l'article 3 bis de la directive, que les mesures prises par les États membres sont compatibles avec le droit communautaire, la Commission pourrait considérer que l'introduction, dans la liste française, d'épreuves ne remplissant pas au moins deux de ces quatre critères est préjudiciable aux chaînes à accès restreint des autres États membres reçues en France, qui se verraient indûment contraintes de céder à des chaînes à accès libre françaises ou de partager avec elles les droits de retransmission qu'elles détiennent sur ces épreuves.
 
Il y a lieu de relever à cet égard que les listes qui, à ce jour, ont été avalisées par les instances communautaires comportent un nombre très modeste d'épreuves.
 
Après avoir recherché, à la lumière des critères communautaires, quelles épreuves retenues par le projet de décret revêtaient incontestablement un caractère d'importance majeure pour la société française, au fort retentissement national, le Conseil a considéré que devraient, en tout état de cause, être qualifiés d'importance majeure :
 
- les Jeux olympiques d'été et d'hiver ;
- les matchs officiels de l'équipe de France de football ;
- le match d'ouverture, les demi-finales et la finale de la Coupe du monde de football ;
- la finale du championnat d'Europe des nations de football ;
- la finale de la Coupe de France de football ;
- la finale de la Ligue des champions de football à laquelle participe un club français ;
- les matchs du tournoi des Six Nations de rugby auxquels participe l'équipe de France ;
- les matchs de la Coupe du monde de rugby auxquels participe l'équipe de France ;
- les finales des simples messieurs et dames de Roland-Garros auxquelles participe un(e) Français(e) ;
- la finale de la Coupe Davis de tennis à laquelle participe l'équipe de France ;
- le tour de France cycliste masculin ;
- les finales des épreuves du championnat du monde d'athlétisme auxquelles participe un(e) Français(e).
 
Pourraient éventuellement, selon le Conseil, également figurer dans la liste certaines des épreuves suivantes :
 
- la finale de la Ligue des champions de football en dépit de l'absence de club français ;
- la finale de la Coupe de l'UEFA de football à laquelle participe un club français ;
- la finale de la Coupe du monde de rugby en dépit de l'absence de l'équipe de France ;
- les épreuves de basket-ball et de handball mentionnées aux points 17 à 20 du projet.
 
Le Conseil souhaite par ailleurs vous faire les suggestions suivantes :
 
L'"événement d'importance majeure", objet même du décret, n'est pas défini. Sans doute serait-il opportun d'introduire dans le décret les critères communautaires précités pour en faciliter la lecture.
 
L'article 4 du projet pose le principe d'une diffusion intégrale et en direct de l'événement d'importance majeure par un service de télévision à accès libre mais prévoit qu'il puisse y être dérogé notamment si l'épreuve se déroule entre 0 et 6 heures, heure française, justifiant une diffusion en différé devant débuter avant 8 heures. Afin de ne pas restreindre à l'excès la marge de manoeuvre des diffuseurs et de ne pas pénaliser les téléspectateurs si l'épreuve se déroule le week-end ou un jour férié, il serait préférable de repousser au-delà de 8 heures l'horaire butoir.
 
L'article 5 du projet de décret donne compétence au CSA pour apprécier le caractère équitable, raisonnable et non discriminatoire des propositions de vente ou d'achat de droits que peuvent faire les éditeurs de services de télévision lorsque l'éditeur d'un service à accès restreint doit renoncer aux droits exclusifs de retransmission qu'il détient. Il serait sans doute souhaitable, pour lever toute ambiguïté, que soient précisément indiquées les modalités de saisine du Conseil.
 
Si le projet aborde la question de la rétrocession des droits entre éditeurs de services, il reste en revanche muet sur la question de l'appel d'offres infructueux, lancé par l'organisateur d'un événement d'importance majeure et auquel aucun service de télévision à accès libre ne répondrait. En vue de prévenir un vide juridique, sans doute conviendrait-il que le décret applique à cette situation un régime répondant à la même finalité que celui prévu en son article 5 : sous peine de priver l'ensemble du public français de la retransmission d'un événement d'importance majeure, un éditeur de service de télévision à accès restreint devrait pouvoir se porter acquéreur en exclusivité des droits de retransmission de cet événement si aucun éditeur de service à accès libre ne se manifeste. Le décret pourrait confier au CSA le soin de rechercher avec les intéressés les moyens d'éviter une telle situation, notamment en invitant éditeurs de services à accès libre et à accès restreint à s'accorder en vue d'une diffusion commune de l'événement."